L’habitat rural de Savoie s’inscrit dans une tradition architecturale alpine qui, en général, réunit sous le même toit hommes, bêtes et fourrage. Son adaptation aux rigueurs géographiques et climatiques de la montagne est remarquable. Chaque vallée a ses propres caractéristiques architecturales : dans les maisons du Beaufortain, pays de forêt en moyenne montagne, l’usage du bois est dominant.
La pente et le soleil Partout, la localisation des maisons sur les versants obéit à l’exposition au soleil et à la place disponible : les versants d’adret sont largement occupés jusqu’à 1400 ou 1600 mètres d’altitude. La maison est toujours adossée à la pente, par conséquent la partie amont s’enterre à demi et la façade aval est tournée vers la vallée. On entre ainsi de plain pied dans la grange par l’arrière et par le côté dans le logement.
La forme des maisons Les maisons sont bâties en largeur, d’en moyenne 13 à 15 mètres de façade sur 8 à 12 mètres de profondeur. Un toit à deux pans peu incliné, couvert de tuiles de bois, coiffe cette maison-bloc comme la grange. La base de la maison, occupée le plus souvent par les étables, est construite en pierre, de même que le logis, qui occupe un angle du premier étage, avec des murs épais de 60 à 80 cm. En revanche, les parois de la grange sont en grosses poutres de bois. Entre les trois niveaux, il n’existe que des planchers, même lorsque la famille loge au-dessus des bêtes. Les balcons (solarets) sont superposés, sur la façade au soleil ; ils servent de communication entre les pièces d’habitation On y sèche le bois de chauffage, et on y fait mûrir les récoltes tardives (fruits…).
La construction à « mi-bois »Les parois de la grange sont construites en empilement de troncs d’épicéa, équarris à la hache et assemblés par encoches soigneusement emboîtées (comme les jeux de construction de maisons en bois). Technique très ancienne, provenant des forêts germaniques, elle n’exige pas de grande complexité de construction : les poutres encastrées à 20 ou 30 cm de leur bout, sont maintenues de loin en loin par deux poutres verticales (les raidisseurs) serrées par un verrou. Ce procédé demandait 100 à 150 troncs d’épicéas pour la construction d’une seule maison.
Des toits recouverts d’ancellesDans les hautes vallées, la neige étant un isolant naturel, on s’arrangeait pour la conserver sur les toits le plus longtemps possible. De là des toits à faible pente, couverts de planchettes d’épicéa, les ancelles. Ces tuiles de bois étaient placées sur quatre à six épaisseurs, sans aucun clou, seulement lestées par des pierres. Dans certaines constructions aujourd’hui, elles sont encore utilisées. Elles résistent à l’eau et au gel pendant une dizaine d’années, après quoi on les retourne. Cependant, pour des raisons pratiques et économiques, ces couvertures sont souvent remplacées aujourd’hui par de la tôle.
Dans ces maisons de montagnards, massives, dispersées sur les pentes, certaines pièces de construction, taillées dans les épicéas des forêts beaufortaines, datent parfois de cinq siècles.