Le rocher et la chapelle Saint-Michel d’Aiguilhe, Le-Puy-en-Velay

Au 10^e siècle, Truannus, doyen du chapitre de la cathédrale du Puy-en-Velay, obtient de l’évêque Godescalc d’édifier un oratoire dédié à l’archange saint Michel au sommet du neck volcanique qui domine aujourd’hui le bourg d’Aiguilhe. Consacrée en 962, la chapelle fait l’objet d’un important pèlerinage, lié à ceux de la Vierge noire et de Saint-Jacques-de-Compostelle.

Un culte venu du Proche-Orient
Originaire du Proche-Orient, le culte de saint Michel apparaît en Italie à la fin du 5^e siècle et se répand à travers l’Europe. Premier des archanges, saint Michel est considéré comme le « Prince de la milice céleste ». Souvent représenté sous les traits d’un jeune homme terrassant un dragon, il est aussi le peseur des âmes lors du Jugement dernier, et l’ange qui guide les défunts. La plupart des édifices qui lui sont dédiés ont la particularité d’être construits sur des sites élevés exceptionnels (Monte Gargano en Italie, Mont Saint-Michel en France...).
Au 11^e siècle, le sanctuaire d’Aiguilhe est doté d’un hôpital et d’un cimetière, situés au pied du rocher, afin d’assurer l’accueil des pèlerins et l’inhumation des pauvres. On leur adjoint du début du 12^e siècle une chapelle consacrée à saint Clair, toujours visible. De petite taille et de forme octogonale, c’est un remarquable exemple d’architecture romane.

Une architecture singulière
Dans son premier état du 10^e siècle, la chapelle Saint-Michel forme un espace carré couvert d’une coupole et flanqué de trois absidioles hémisphériques. A la fin du 12^e siècle, devant l’affluence des pèlerins, la chapelle est agrandie d’une nef à déambulatoire qui épouse la forme du rocher, utilisant ainsi tout l’espace disponible de la plateforme. Un clocher est également édifié, et, pour faciliter l’accès des pèlerins, on aménage dans la roche un escalier ponctué de trois oratoires, dont il subsiste encore quelques vestiges. La façade d’entrée, de la même époque, offre un décor exceptionnel tant par le jeu de polychromie de ses pierres de parement que par la richesse de son programme sculpté. Le portail comporte, au-dessus du linteau sculpté de sirènes, un tympan aux arcs trilobés orné de rinceaux finement ciselés. Dans chaque lobe, les scènes évoquent l’Apocalypse par la représentation de l’Agnus Dei au centre, des quatre Vieillards à droite et des quatre Vivants à gauche. Les deux colonnettes encadrant le portail sont surmontées de chapiteaux portant à gauche deux aigles aux ailes déployées et à droite deux diacres tenant en main une double fleur de lys, symbole de pureté. Au deuxième niveau, sont aménagées cinq niches enfermant chacune une statue : Dieu le père au centre, la Vierge et saint Jean à gauche, saint Michel et saint Pierre à droite.
A l’intérieur, 32 chapiteaux feuillagés en arkose de Blavozy couronnent les colonnes monolithes. Les parois du chœur sont entièrement ornées de peintures murales. Sur les voûtes, le Christ en majesté, encadré par le soleil et la lune, fait face à saint Michel entouré de deux séraphins. Les représentations des quatre évangélistes, l’ange de saint Mathieu, l’aigle de saint Jean, le lion de saint Marc et le bœuf de saint Luc complètent la scène. Sur les murs, l’Apocalypse est évoquée par les anges de la Résurrection et la Jérusalem céleste. Dans la nef, les scènes peintes, assez lacunaires, traitent le cycle des Rois mages.
La chapelle a connu plusieurs périodes de restauration, notamment au 19^e siècle (chapiteaux, portail). En 1955, lors de travaux dans le chœur, des ouvriers mettent au jour un trésor constitué d’un coffret d’ivoire contenant notamment une croix pectorale et un christ reliquaire du 12^e siècle. Les peintures murales ont été restaurées en 2004.