A la fin du 18e siècle, le territoire de l'actuel département de Haute-Savoie est encore caractérisé par une agriculture qui fonctionne sur le modèle de la polyculture. La spécialisation laitière actuelle s'est progressivement mise en place au 19e siècle. La fruitière, lieu de production mais également architecture singulière, s'est alors développée.
L'apparition d'un lieu de production
La première étape de la spécialisation laitière a lieu dans les années 1820 avec la création des fromageries coopératives les fruitières. Elles ont pour origine le système communautaire des alpages, appelé « fruit commun ». L’été venu, les montagnards regroupaient les bêtes du village pour les monter au alpage. Les meules de fromage, gruyère ou emmental, représentaient le « fruit » « commun ». En plaine et dans les avant-pays, les fruitières apparaissent en même temps qu'une économie de marché du fromage. Les premières s'installent dans les zones de contact entre la plaine, la montagne et la ville : dans les années 1820, à proximité de Genève ; dans les années 1845, dans le bassin annécien.
Une architecture modèle
Un architecture spécifique aux fruitières se met en place progressivement. Elle est soutenue par les pouvoirs publics. En 1895, le conseil général de Haute-Savoie favorise la publication d'un guide détaillé présentant les plans et devis de plusieurs bons exemples de fruitières. Dès lors, les sociétés coopératives nouvelles comprennent l'importance d'une architecture appropriée. Les fruitières construites selon ces modèles se reconnaissent à leur silhouette que l’on pourrait confondre avec la gare ou la poste.
L'histoire de la fruitière de Seynod
En 1889, cinq bourgeois d’Annecy créent une première fruitière et sa porcherie mitoyenne à l’embranchement de la route de Malaz et de la route nationale 201. Le 9 janvier 1926, une société coopérative est fondée par 39 agriculteurs. Le président de la coopérative et les sociétaires avaient la charge de rechercher un fruitier qui transformait le lait en tomes, fromages ou beurre. Le petit lait était utilisé pour nourrir les cochons de la porcherie mitoyenne. Le lait était évalué en kilos et non en litres. Le poids était reporté sur un carnet fourni par l’agriculteur. En fin de mois chacun recevait le paiement de sa livraison.
La fruitière, lieu de sociabilité
La fruitière était aussi un point de vente au détail du lait (encore chaud) et des produits fabriqués par le fruitier .Chacun venait avec son ‘’bidon à lait’’ de 1 ou 2 litres. C’était le point de rencontre des agriculteurs et d’une population rurale environnante .Ce moment était l’occasion d’échanger des nouvelles et de s’enquérir de la santé de tel ou tel ,de la vie des différents hameaux, des décisions du conseil municipal ou des progrès de l’agriculture.
Le déclin des activités agricoles, l’industrialisation et l’urbanisation ont mis un terme à cette activité. La société fruitière est dissoute le 17 juillet 1992. Elle est détruite peu après.